Le pouvoir des femmes

La Weibermacht ou le pouvoir des femmes est un phénomène social et culturel qui a connu un développement unique dans l'espace germanique et en Europe du Nord au cours du Moyen Âge et de la Renaissance, Il est devenu un sujet artistique et littéraire qui montre certains héros et grands hommes de l'Antiquité et des Saintes Écritures succombant à des femmes qui utilisent leur ruse et leur beauté pour les dominer et les ridiculiser, présentant une inversion admonitoire de la prépondérance hiérarchique masculine, remise en question par cette transposition des rôles entre les deux sexes.

Si cette guerre des sexes est vieille comme le monde, plusieurs facteurs se sont conjugués au cours du Moyen Âge pour faire émerger la Weibermacht comme un phénomène à part entière. L'un de ces facteurs est l'apparition, à la fin du XIVe siècle, d'une série d'œuvres littéraires à caractère apologétique qui louent et défendent les femmes, des écrits qui ont été largement diffusés et ont eu un impact énorme, générant un débat sur la nature des hommes et des femmes, sur les affinités et les différences entre les deux sexes et sur les règles qui doivent régir leurs relations.

Ainsi, en réaction à ce courant de pensée qui donnait raison aux femmes, une myriade d'estampes ont vu le jour pour les ridiculiser et les mettre en garde contre le danger qu'elles représentaient pour les hommes. L'exposition Le pouvoir des femmes - Échos de la Weibermacht dans la collection Mariano Moret, rassemble une cinquantaine de ces œuvres extraordinairement rares provenant des burins de quelques-uns des plus importants graveurs de l'époque, tels que Lucas van Leyden, Albrecht Altdorfer, Sebald Beham, Heinrich Aldegrever et Georg Pencz, ainsi que d'autres artistes allemands, flamands, hollandais, français et italiens de l'époque, des artistes néerlandais, français et italiens des XVe, XVIe et XVIIe siècles, montrant la force, l'étendue et la validité de ce phénomène, qui révèle les craintes, l'incertitude et la perplexité des habitants des villes prospères d'Europe face aux changements sociaux et culturels qui ont coïncidé avec le début de l'ère moderne.

Un ensemble de peintures sur le même thème, provenant de la collection du musée des beaux-arts de Séville, s'insère naturellement dans le discours de l'exposition, l'enrichissant et apportant un contraste intéressant et une touche de couleur aux estampes exposées.

Détestée ou admirée, désirée ou crainte, la femme a peuplé les fantasmes et les œuvres des artistes de la Renaissance et du Baroque qui, à travers leurs gravures et leurs peintures, ont tenté de résoudre l'énigme qui se dressait devant eux et avec laquelle ils partageaient un lit. Ils aspirent ainsi à comprendre cette autre moitié du monde qu'ils savent si proche d'eux, mais qu'ils perçoivent comme si lointaine et si différente.